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Epiphanie : Les moines de l’abbaye St Martin de Savigny dégustaient ils la galette ?

6Jan,2025

La galette se déguste généralement autour du 6 janvier, date du « jour des Rois » ou Épiphanie, une fête chrétienne. Elle fait référence à la visite des rois mages venus à Bethléem auprès de l’enfant Jésus, douze jours après Noël.

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Ronde pour symboliser le soleil

La tradition veut que le plus jeune de l’assemblée se cache sous la table, et assure à l’aveugle la distribution des parts. Celui qui trouve la fève en mangeant est déclaré « roi ». 

 La galette des Rois est ronde pour évoquer le soleil (le Christ est la lumière du monde) et l’univers (le Christ Dieu de l’univers) ; la couronne rappelle quant à elle les Rois mages et la royauté divine du Christ, la fève désigne sa venue cachée, rappelle Marie-Odile Mergnac dans son ouvrage Petite histoire de nos fêtes en France. 

Ce fameux gâteau, résumé d’un cours de théologie à lui seul, existe au moins depuis le XIIIe siècle (on l’évoque comme coutume déjà ancienne dans un texte rédigé à Amiens en 1311). »

Tirer les rois, une tradition romaine

L’origine de la galette est bien plus ancienne : elle remonte à l’époque romaine.

Dans l’Antiquité, les Romains célèbrent en décembre la fête des Saturnales. Tacite, historien du Ier siècle, évoque la tradition du « Roi du jour » : un banquet au cours duquel maîtres et esclaves partagent un même repas. À cette occasion, une fève (haricot) est dissimulée dans un gâteau dont l’aspect rond et doré symbolise déjà le soleil. Celui qui tombe sur la fève devient le « Prince des Saturnales » ; il a le droit d’exaucer tous ses désirs pendant une journée, devenant le roi d’un jour.

La fève, symbole de fécondité

Dès l’Antiquité, la fève (de haricot blanc ou autre légumineuse) est choisie comme élément caché dans la galette, car c’est l’un des premiers légumes à pousser après l’hiver. 

Cette graine est un symbole de fécondité, car elle porte en elle le germe de la future plante. On ne pouvait trouver mieux pour célébrer Saturne, Dieu romain dédié à l’agriculture ! 

Au Moyen-Âge, la tradition perdure, la fève étant l’un des aliments les plus consommés en Europe.

La frangipane, une invention italienne

Aujourd’hui, la recette traditionnelle de la galette est à base de crème frangipane (un tiers de crème d’amande, deux tiers de crème pâtissière). 

Elle devrait son nom au comte Cesare Frangipani, qui aurait offert la recette à Catherine de Médicis au XVIe siècle, en cadeau de mariage lors de ses noces avec le futur Henri II. 

Dans la tradition franciscaine, on fait toutefois remonter son origine au XIIIe siècle, en l’attribuant à Jacqueline de Septisoles, jeune veuve du noble romain Graziano de Frangipani, et proche de François d’Assise, à qui elle avait pour habitude d’offrir des gâteaux aux amandes.

Des formes et des recettes différentes selon les régions

La galette à la frangipane est aujourd’hui la plus consommée dans l’Hexagone.

Composée de crème aux amandes entourée de pâte feuilletée, elle s’est imposée peu à partir du XVIe siècle, suite à une querelle entre pâtissiers et boulangers. À l’époque, les deux corporations se disputent le monopole de la vente du fameux gâteau des rois, fabriqué à partir d’une pâte au levain. Ils en appellent au roi de France, François Ier, qui tranche en faveur des premiers. Qu’à cela ne tienne, les boulangers contournent cette interdiction en remplaçant le gâteau par une galette à base de pâte feuilletée !

D’autres recettes ont perduré dans certaines régions, en fonction des traditions.

 

Une tentative d’interdiction à la Révolution

Au moment de la Révolution française, certains parlementaires ne voient pas la galette des rois d’un bon œil. En 1792, un député de la Convention, Pierre-Louis Manuel, propose à l’Assemblée l’interdiction de la fête des Rois, sans succès. . Le gâteau est alors rebaptisé galette de l’Égalité et ne contient pas de fève.

La fève en porcelaine, une invention pour éviter la triche

À partir du Moyen-Âge, la dégustation s’est accompagnée peu à peu d’une autre tradition, celle du « Roi boit ». Elle consistait pour celui qui avait trouvé la fève à offrir à boire à tous les convives autour de la table ! 

Certains resquilleurs, pour éviter de payer leur tournée, avalaient la fève afin d’éviter l’addition… Petit à petit, le haricot est remplacé par une pièce – beaucoup moins digeste ! – afin d’éviter la triche. Quant aux fèves en porcelaine, les premières apparaissent à partir de 1874.

La fabophilie, l’art de collectionner les fèves

Si les premières fèves sont d’inspiration religieuse, avec des représentations de personnages de la crèche ou des angelots, progressivement, l’étiquette religieuse de la fève disparaît pour laisser place à une fête plus traditionnelle.

Les fèves peuvent alors évoquer la chance (trèfle, fer à cheval), mais aussi des animaux ou des objets du quotidien.

Aujourd’hui, les sujets sont très variés, entre l’actualité, les personnages de BD, dessins animés et films à la mode, ou encore la publicité…

Pas de fève dans les galettes américaines

Aux États-Unis, il y a sans doute moins de fabophiles qu’en France, et pour cause : les galettes commercialisées là-bas sont dépourvues de fèves ! 

La raison ? La peur d’un mauvais procès intenté par un client qui risquerait de s’étouffer ou de se casser une dent… 

Si les Américains souhaitent une fève, ils doivent ainsi la demander à part et la placer eux-mêmes dans le gâteau.

Pas de fève non plus à l’Élysée

Au palais de l’Élysée, on déguste aussi la galette de L’Épiphanie chaque année. 

La tradition a été instaurée en 1975 par Valéry Giscard d’Estaing, une manière de saluer les savoir-faire artisanaux de la profession. 

La spécificité de la galette de l’Elysée tient au fait qu’elle ne comporte ni fève, ni couronne. En effet, selon les règles républicaines nées après la Révolution française : à l’Élysée, il peut y avoir un Président… mais pas de roi !

Conclusion

Les moines de l’abbaye ont connu la tradition de la galette des rois. On peut supposer qu’ils ont goûté à la frangipane. Les derniers moines , après la suppression de l’abbaye ont également connu la galette de l’égalité.

A une époque où les mœurs étaient plus dissolues, on peut imaginer que les moines lors de « leurs sorties » dans les tavernes de Sain Bel auraient pu se plier à la tradition du « roi boit »….mais aucun témoignage ne nous est parvenu.

Sources : Gautier DEMOUVEAUX. Ouest-France 4 janvier 2024